Les présumés propriétaires du domaine en cours d’expropriation destiné à abriter la Centrale électrique de Maria-Gléta sis à Abomey-Calavi, ont intenté un recours près la Cour. De même, François Xavier Loko a introduit une demande en inconstitutionnalité de l’article 2 de la loi n°35-10 du 30 décembre 2010 portant règles particulières pour l’élection des membres de l’Assemblée nationale. La Cour a tranché sur ces différents recours lors de son audience publique du mardi 14 août 2018. Voici en substance les résumés de ces décisions auxquelles s’ajoutent celles d’une radiation de la Gendarmerie et d’un concours des inspecteurs en Douanes.
Décision Dcc 18-178 du 14 août 2018
Par requête en date à Cotonou du 06 juillet 2018, Monsieur François Xavier Loko, introduit une demande en inconstitutionnalité de l’article 2 de la loi n°35-10 du 30 décembre 2010 portant règles particulières pour l’élection des membres de l’Assemblée nationale d’une part et d’autre part, de l’enregistrement par le Ministère de l’intérieur, de mouvements politiques s’assimilant aux partis politiques.
Le requérant soutient que l’article 2 de la loi n°2010-35 du 30 décembre 2010 portant règles particulières pour l’élection des membres de l’Assemblée nationale, il a été procédé au découpage du territoire national en 24 circonscriptions électorales avec pour impact une « régionalisation » de l’élection des représentants de la nation. Ces derniers s’estiment alors exclusivement responsables vis-à-vis des électeurs de leurs circonscriptions électorales et non de l’ensemble des citoyens. Il en déduit, que cette disposition est en contradiction avec l’article 80 de la constitution et l’article premier de la loi N°2013-06 portant code électoral en république du Bénin qui dispose « …chaque député est le représentant de la nation toute entière. Tout mandat impératif est nul. » D’où la nécessité « de rétablir l’impératif à valeur constitutionnelle que constitue l’ouverture de l’élection des représentants de la Nation au suffrage universel direct impliquant directement tous les citoyens ».
Par ailleurs, il demande à la Cour de déclarer contraire à la Constitution l’enregistrement, par le Ministère de l’intérieur, de mouvements politiques qui s’assimilent aux partis politiques et qui rivalisent avec ces derniers dans l’animation de la vie publique.
Sur l’inconstitutionnalité de l’article 2 de la loi n°35-10 du 30 décembre 2010 portant règles particulière pour l’élection des membres de l’Assemblée nationale.
Aux termes de l’article 124 alinéa 2 de la Constitution : « Les décisions de la Cour constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités civiles, militaires et juridictionnelles. »
Par décision Dcc 10-152 du 28 décembre 2010, la Haute juridiction a déclaré conforme à la constitution en toutes ses dispositions la loi n°35-10 du 30 décembre 2010 portant règles particulières pour l’élection des membres de l’assemblée nationale, votée le 24 août 2010 par l’assemblée nationale et mise en conformité avec la constitution le 21 décembre 2010 suite aux décisions Dcc 10-117 du 08 septembre 2010, Dcc 10-122 du 16 octobre 2010, Dcc 10-145 du 14 décembre 2010.
Considérant que la loi n°2013-06 du 25 novembre 2013 a été aussi déclarée conforme à la Constitution en toutes ses dispositions par la décision Dcc 13-169 du 19 novembre 2013 et qu’en raison de l’autorité de la chose jugée, la requête de Mr François Xavier Loko est irrecevable
Article 1er: La requête de Mr François Xavier Loko est irrecevable en ce qui concerne la demande de contrôle de constitutionnalité de l’article 2 de la loi n°35-10 du 30 décembre 2010 portant règles particulières pour l’élection des membres de l’Assemblée nationale
Article 2 : Il n’y a pas violation de la Constitution en ce qui concerne l’enregistrement de mouvements politiques.
Décision Dcc 18-174 du 14 août 2018
Par requête en date à Porto-Novo du 25 octobre 2017, Monsieur Latifou Okeicha, forme un recours en inconstitutionnalité de sa radiation des effectifs de la Gendarmerie nationale et demande sa réintégration. Le requérant expose qu’à la suite de deux condamnations d’emprisonnement ferme, l’une à six mois et l’autre à douze mois, prononcées contre lui par le Tribunal de première instance de première classe de Porto-Novo, il a été radié des effectifs de la Gendarmerie nationale sans la tenue préalable d’un conseil de discipline.
En réponse, le Lieutenant-colonel Marcel Adjaho, directeur général de la Gendarmerie nationale par intérim, indique que la décision n°1244/2-Dggn/Dp/Sec/Chan du 21 juin 2011 portant radiation de Monsieur LatifouOkeicha des effectifs de la gendarmerie nationale a été prise conformément aux articles 22,107,133 alinéa 2 de la loi n°2005-43 du 26 juin 2006 portant Statut général des personnels militaires des forces armées béninoises qui régissent la radiation d’un militaire de rang consécutivement à une condamnation d’emprisonnement ferme pour infraction portant atteinte à l’honneur ou à la probité.
En réplique, monsieur Latifou Okeicha, par correspondance en date à Porto-Novo du 27 juillet 2018 enregistrée au secrétariat de la cour le 30 juillet 2018 sous le numéro 1461, a transmis à la Cour l’extrait d’un document qui serait intitulé « livre vert portant règlement et Statut général des militaires de l’armée béninoise » ; cet extrait mentionne la condamnation à une peine de prison par une juridiction pénale comme une des causes motivant l’envoi d’un militaire devant le conseil de discipline.
En l’espèce, la requête n’évoque l’inconstitutionnalité d’aucune loi, d’aucun texte ou acte. Les faits dénoncés ne sont pas non plus constitutifs de violation de droit de l’homme. La requête tend plutôt à faire apprécier par la cour la régularité de la radiation de monsieur Latifou Okeicha des effectifs de la gendarmerie nationale. L’appréciation d’une telle demande relève du contrôle de légalité. La cour, juge de la constitutionnalité, ne saurait en connaître. La cour décide :
Article 1er : La cour est incompétente
Décision Dcc18-175 du 14 août 2018
Par requête en date à Abomey-Calavi du 15 décembre 2017, Monsieur Eusèbe Goubalan, forme un recours pour rupture du principe d’égalité dans le cadre des opérations de dédommagement des présumés propriétaires du domaine en cours d’expropriation destiné à abriter la centrale électrique de Maria-Gléta sis à Abomey-Calavi.
Le requérant allègue que, dans le cadre de la délimitation dudit domaine, sa parcelle a été amputée d’une superficie de 113 mètres carrés sans qu’il soit retenu pour être dédommagé alors que monsieur Célestin Ayadji et Simon Boko dont les parcelles sont situées dans les mêmes positions géographiques que la sienne au regard des limites du domaine, ont été déclarés éligibles au dédommagement. Il juge ce traitement discriminatoire.
En réponse, le Directeur de cabinet du Ministre de l’énergie, Monsieur Armand Raoul Dakéhoun, précise que le requérant est éligible au recasement plutôt qu’au dédommagement parce que la superficie de la portion amputée de son immeuble n’est pas supérieure à la portion de cet immeuble non incluse dans le domaine. A l’audience de mise en état du 26 juillet 2018, le ministère de l’Energie a produit la copie d’un procès-verbal de séance constatant le règlement amiable intervenu entre les parties et faisant état du consentement du requérant au recasement.
Dans le cadre du dédommagement des présumés propriétaires d’un immeuble, objet d’une procédure d’expropriation, une telle demande relève du contrôle de la légalité.
La Cour décide :
Article 1er: La cour est incompétente.
Décision Dcc 18-177 du 14 Août 2018
Par requête en date à Abomey du 27 avril 2018, Monsieur Boris Biaou Eméko Taio gestionnaire administratif, comptable et financier, attaché des services financiers, agent permanent de l’état en service au Ministère du Plan et du développement forme un recours en inconstitutionnalité de la décision n°059/Mtfp/Dc/Sgm/DgfpDrae/Stcd/Sa du 30 mars 2018 portant invalidation du concours des inspecteurs des finances, session des 16 et 17 décembre 2017 pour traitement inégal.
Le requérant soutient qu’il est dans la même situation juridique que les greffiers agents permanents de l’état qui, qui bien que ne remplissant pas les conditions d’accès au concours de recrutement des auditeurs de justice organisé en 2005, ont été admis à prendre part audit concours en tant que non-Agents permanents de l’Etat ; qu’il est également dans la même situation juridique que « les Agents contractuels ou permanents de l’Etat qui sont régulièrement nommés dans la fonction publique comme des personnes non-Agents de l’Etat en considération de leurs autres profils professionnels acquis en dehors de l’administration publique » ; qu’il demande à la Cour de déclarer contraire à la Constitution la décision querellée, d’ordonner avant dire droit, le sursis à exécution de toutes les décisions administratives que le ministre du Travail et de la fonction publique est amené à prendre sur le fondement de ladite décision, qu’il demande par ailleurs, à la Cour d’étudier son recours en procédure d’urgence.
En réponse, le directeur de cabinet du ministre du Travail et de la fonction publique soutient que conformément aux dispositions du décret n°2008-328 du 19 mai 2008 modifiant et complétant le décret n°2003-298 du 19 août 2003 portant Statut particulier du corps des inspecteurs des finances, le concours a été ouvert aux Agents permanents de l’Etat de la catégorie A1 qui sont à cinq ans au moins de leur départ à la retraite et aux personnes non-Agents permanent de l’Etat titulaires de diplôme donnant accès à la catégorie A1 ; que le requérant Agent permanent de l’Etat, catégorie A3, ne remplissant pas les conditions exigées aux Agents permanents, a, en violation des textes, pris part audit concours en tant que non-Agent permanent de l’Etat ; qu’ainsi son admissibilité a été invalidée.
L’arrêté interministériel du 10 août 2017 portant ouverture et fixation des modalités et programmes d’organisation du concours de recrutement des inspecteurs des finances, relève du contrôle de légalité. La requête de Mr Boris Biaou Taio est irrecevable.
La cour se prononce d’office.
La cour est incompétente