Des violences ont éclaté en Ouganda suite à l’arrestation de Bobi Wine le 13 août. Député, acteur, musicien, l’homme est populaire en Ouganda mais également à l’étranger. De nombreuses personnalités à travers le monde ont signé une pétition de soutien. Et mercredi 22 août à Nairobi, des artistes kényans ont organisé une soirée pour exiger sa libération. « Libérez Bobi Wine », c’est le mantra répété mercredi soir sur scène, avec en fond, un graffiti représentant le député-musicien et son célèbre béret rouge. Pour George Ndiritu, l’organisateur, les artistes kényans ne pouvaient rester silencieux. « Dans les années 80, notre gouvernement arrêtait les musiciens qui disaient la vérité. Nous ne voulons pas qu’un autre pays subisse la même chose. Nous, artistes, devons défendre l’un des nôtres, mais ça va au-delà de Bobi. Ça pourrait arriver à n’importe quelle personne prenant une position politique. » Chansons, poèmes, discours politique, chaque participant a diffusé le message dans sa langue artistique, comme Roger, écrivain et artiste, choqué par la répression en Ouganda. « Comment une telle chose peut arriver de nos jours, aussi ouvertement ? Je devais apporter une contribution, même modeste. Nous avons la chance de pouvoir observer la réalité et de la peindre, la chanter, la filmer. Et toucher le plus grand nombre. » Bobi Wine est connu pour ses critiques du pouvoir ougandais. Mercredi soir, les reproches venaient de Nairobi. Poétesse et artiste, Rabian, en avait après le président Museveni. « Un président doit protéger ses citoyens. Si vous les oppressez parce qu’ils ne sont pas d’accord, alors c’est vraiment de la connerie ! Museveni pense qu’avec son pouvoir il peut faire ce qu’il veut. Il se comporte comme un dictateur. »
La mobilisation doit se poursuivre à Nairobi. Une manifestation se tiendra ce jeudi dans le centre-ville pour demander qu’on relâche Bobi Wine.
Pétition de soutien
Mais les artistes kényans ne sont pas les seuls à se mobiliser. 88 personnalités du monde de la culture, hommes politiques ou défenseurs des droits humains ont signé une pétition en la faveur de Bobi Wine.
C’est notamment le cas de la Béninoise Angélique Kidjo, du Malien Toumani Diabaté, du Nigérian Femi Kuti ou encore de Chris Martin de Coldplay ou Damon Albarn de Blur et Gorillaz. Ils réclament l’accès à des soins et un traitement impartial de l’affaire.
Ils promettent de rester vigilants et de mobiliser le cas échéant leurs réseaux respectifs pour défendre l’artiste et opposant. L’initiateur de la pétition en sa faveur est Rikki Stein, l’ancien producteur de Fela Kuti, créateur de l’afrobeat nigérian et engagé politiquement dans son pays. Alors forcément cela lui rappelle quelque chose.
« J’étais déjà passé par là… Voir un artiste prendre la parole contre une administration, contre l’Etat, cette histoire continue avec Bobi Wine qui est non seulement chanteur mais aussi politicien et membre du Parlement ougandais. En Ouganda, 80% de la population a moins de 30 ans. Et ils adorent Bobi Wine. Et pour moi, son courage, sa détermination, sa vision d’une société plus juste, méritent d’être soutenus. »
Avocat international
Sur le terrain judiciaire, la famille de Bobi Wine a recruté un cabinet d’avocats international, basé à Londres et Washington DC. Cabinet dirigé par le Canadien Robert Amsterdam.
« C’est une affaire de torture d’Etat donc elle n’est pas limitée à la justice ougandaise. Nous allons nous tourner vers diverses institutions internationales, des Nations unies au Commonwealth. Il y a une convention internationale contre la torture, il y a des rapporteurs spéciaux des Nations unies chargés de surveiller ce domaine et il y a diverses institutions chargées non seulement de la torture mais aussi des détentions illégales et arbitraires. »
Robert Amsterdam se dit donc prêt à se battre au niveau international pour son client. « Donc nous avons l’intention, non seulement de nous battre en Ouganda mais aussi à l’international pour demander justice pour Bobi Wine, une enquête sur sa torture et sur les importantes violations par l’Ouganda de ses obligations en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. L’Ouganda a signé un certain nombre de traités internationaux qu’il a violé et il va devoir rendre des comptes. »
RFI