e refus du Chef de l’Etat, Patrice Talon, d’amender la Constitution par voie référendaire est bien accueilli par la classe politique. Le Secrétaire exécutif national des Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe), Valentin Djènontin, et certains observateurs politiques interrogés s’accordent à reconnaître qu’il s’agit d’une bonne décision. Ils étaient au micro de la radio Océan Fm hier, jeudi 02 août 2018.
Valentin Djènontin, Secrétaire exécutif national des Fcbe : « C’est une décision sage »
J’ai pris cette décision du Chef de l’Etat comme un signe de sagesse. C’est la preuve que le président a commencé par prendre la mesure de la responsabilité qu’il a à la tête de l’Etat. C’est cela qui fait un Chef. Il voit plus loin, parce qu’il a plus d’informations que ceux qui se disent ses soutiens. Il y a une loi qui régit le recours au référendum, mais avec cette loi, les conditions ne peuvent pas être réunies. Même si la loi est révisée, nous ne serons pas en mesure de respecterle délai, compte tenu des directivesau niveau de la Cedeao par rapport à la tenue de ce référendum avant les législatives de 2019. Et comme le président l’a dit, est-ce-que c’est le moment d’engloutir une somme aussi énorme ? Ces soutiens qui disent qu’ils vont prendre leurs responsabilités politiques ne pensent qu’à leur intérêts personnels et privés, mais le Chef de l’Etat a l’obligation de veiller à l’intérêt général. Donc, je pense que c’est une décision de sagesse qu’il a prise. Je salue sa clairvoyance. Je ne pense pas que ce soit à cause des dépenses à effectuer, mais je vois cela comme une décision de sagesse. C’est cela l’autorité.
Gérard Gbénonchi, député à l’Assemblée nationale :« Ce n’est pas un échec »
Comme tout le monde, j’ai suivi le Chef de l’Etat et je prends acte de sa décision de ne pas faire usage de sa prérogative constitutionnelle de soumettre la proposition de loi portant amendement de la Constitution au référendum. Je pense qu’il s’agit d’une bonne décision et je lis à travers son raisonnement qu’engager les dépenses publiques pour aller au référendum contraste avec sa volonté d’assainir les finances publiques. Il ne remet pas en cause la pertinence de la proposition d’amendement de notre loi fondamentale, mais il aurait souhaité que cette réforme mineure et basique soit opérée au niveau de l’Assemblée nationale. Ce n’est pas un échec. Vous savez qu’après le vote où nous avons obtenu les ¾ qui consacraient la prise en compte de la proposition d’amendement de la Constitution et après l’échec au stade d’obtenir les 4/5, la Constitution impose que la suite soit du ressort du Chef de l’Etat. Donc, au niveau du Parlement, nous avons fini notre partition et notre souhait aurait été que le processus se poursuive. Le président de la République à qui appartient cette prérogative, qui connaît bien l’état des finances, a martelé qu’accepter de soumettre cette proposition au référendum serait allé contre la marque qu’il a imprimée à sa gouvernance à savoir : la rationalisation des dépenses publiques. Surtout que dans quelques mois, nous avons encore devant nous les élections législatives. Donc, il a dit qu’il n’est pas du tout prêt à aller dans ce sens et nous devrons le comprendre, étant donné que c’est lui qui est le garant de nos finances publiques.
Hygin Kakaï, politologue : « Le Chef de l’Etat a fait un bon choix »
Le Chef de l’Etat a fait un bon choix.Je dirai qu’il s’agit également d’un choix rationnel.Il a évoqué les raisons comme la loi organique sur le référendum et le coûtqui ne lui permettent pas de convoquer le peuple pour l’amendement de la Constitution. Mais, si on s’en tient également à la sociologie électorale, il y a ce que nous appelons la capacité d’action publique qui peut jouer en défaveur du président de la République.En raison des questions économiques et des conditions de vie des populations, l’organisation du référendum peut aboutir à un vote non pas contre le texte de révision de la Constitution, mais plutôt contre la personne de Patrice Talon. Pour avoir écouté un peu la rue, ce n’est pas le projet de révision de la Constitution qui intéresse la population, mais l’amélioration du panier de la ménagère. Nous appelons cela le vote économique. Je dirai également que les Béninois ont fini par développer une relation sacrée avec la Constitution, et réviser cette loi fondamentale par la voie référendaire est aussi un risque de voir le projet échoué.
Propos recueillis par Rachida Houssou/Actubenin