Plus d’une centaine de personnes ont également été blessées lors de ces heurts, tandis que le mouvement de protestation semblait par ailleurs s’étendre à d’autres grandes villes du Pakistan comme Karachi.
Quelque 8.500 policiers et paramilitaires avaient été déployés au petit matin pour participer à l’opération dans la capitale, selon un responsable du ministère de l’Intérieur. Le nombre de manifestants est estimé à quelque 2.000 personnes. Des directives avaient été données pour que l’évacuation ne fasse aucune victime, selon un haut responsable de la police d’Islamabad.
Mais quand des policiers en tenue anti-émeute ont tiré de premières grenades lacrymogènes et des balles en caoutchouc en direction des protestataires, ceux-ci ont répliqué avec des pierres et autres projectiles, selon des journalistes de l’AFP sur place.
Un policier est mort après avoir été atteint par une pierre à la tête, d’après un porte-parole de la police d’Islamabad. Un journaliste de l’AFP a par ailleurs vu ce qui semblait être le cadavre d’un manifestant allongé dans une rue de la capitale.
Au moins 139 personnes, dont 93 membres des forces de sécurité, ont été blessées et conduites dans un hôpital d’Islamabad, selon un porte-parole de l’établissement.
Plusieurs personnes ont été arrêtées, alors que des dizaines de protestataires affluaient d’autres quartiers d’Islamabad pour grossir les rangs des militants du Tehreek-i-Labaik Yah Rasool Allah Pakistan (TLYRAP), le groupe religieux peu connu qui pilote le mouvement, a constaté l’AFP.
Depuis le 6 novembre, les manifestants occupent un pont routier à la limite entre Islamabad et la ville voisine de Rawalpindi, paralysant l’intense trafic entre les deux villes, aux dépens de dizaines de milliers d’habitants, contraints de subir des heures d’embouteillages. Un enfant de huit ans est mort faute d’avoir pu être transporté à temps à l’hôpital.
Le chef de la puissante armée, le général Qamar Javed Bajwa, a appelé samedi le Premier ministre Shahid Khaqan Abbasi pour lui conseiller de régler la situation « pacifiquement ». « La violence (…) n’est pas dans l’intérêt national », lui a-t-il dit, selon un tweet de son porte-parole.
– Négociations infructueuses –
Le TYLRAP exige la démission du ministre de la Justice à la suite d’une polémique au sujet d’un amendement, finalement abandonné, qu’il lie à la très controversée loi sur le blasphème.
A mesure que la police resserrait son étreinte samedi, des rassemblements de soutien aux protestataires ont démarré dans d’autres villes pakistanaises.
A Karachi, la capitale économique et plus grande ville du pays, environ 200 manifestants ont érigé des barricades sur l’une des principales routes menant au port, d’une importance stratégique pour le pays, selon la police. Et des attroupements de moindre importance ont été recensés à Lahore et dans d’autres villes, d’après les médias pakistanais.
L’autorité régulant les chaînes de télévision a de son côté suspendu plusieurs chaînes d’informations en continu au motif qu’elles diffusaient des images en direct des affrontements.
Les violences interviennent après trois semaines de négociations infructueuses, le gouvernement rechignant à évacuer par la force les manifestants. A moins d’un an d’élections législatives, l’exécutif craint visiblement que cette mesure ne lui coûte trop cher politiquement.
La justice pakistanaise, qui avait exigé à plusieurs reprises du gouvernement qu’il procède à l’évacuation des manifestants, avait annoncé vendredi qu’elle convoquerait lundi le ministre de l’Intérieur, Ahsan Iqbal, pour qu’il s’explique sur l’inaction de l’exécutif.
Selon plusieurs analystes, la réponse du gouvernement a été depuis le début maladroite et « molle », ce qui pourrait créer un dangereux précédent aux yeux d’autres groupes contestataires désireux d’en découdre avec les autorités.
La justice a également convoqué lundi le responsable local des services secrets pakistanais (ISI) afin qu’il atteste de la non-implication de cet organe dans le sit-in.
Ces agences, notamment celles contrôlées par l’armée pakistanaise, comme l’ISI, ont été accusées de saper l’autorité de précédents gouvernements par des actions similaires.
AFP